Bon, le dernier, en allemand, qui recoupe plus ou moins les articles français :
Article InfoSperber, avec le titre :
https://www.infosperber.ch/politik/luft ... taendlich/
Tentative de traduction vite fait (s'fait tard...) sur base Google Trad (bon, en relisant y a des passages pas très clairs, mais là, Morphée m'appelle avec violence)
27 juin 2021
Selon l'expert aéronautique Georges Bridel, le choix du F-35 serait incompréhensible. L'avion de chasse américain est bon pour les bombardements lors de missions en réseau, mais mauvais pour la Suisse, estime ce spécialiste de longue date de l'aviation de chasse.
En réponse à diverses publications sur l'achat d'avions de combat dans l'Infosperber, l'expert aéronautique suisse de renommée internationale Georges Bridel nous a envoyé une appréciation précise relative à ce marché d'armement controversé. Infosperber la rapporte dans son intégralité.
Un choix en faveur du F-35 : une préférence incompréhensible de la part du ministère de la Défense :
Dans la discussion en cours sur l'achat d'un nouvel avion de chasse, il n'est question, le plus souvent, que des modèles d'avions engagés dans la compétition. Le contexte, c'est-à-dire les conditions-cadres de la politique de sécurité et de défense qui sont essentielles pour la Suisse, est le grand absent.
Exclusion du contexte de politique sécuritaire :
Les exigences de la guerre aérienne moderne ont été abordées en se référant aux dangers sur le plan mondial. Mais ça n'est pas réaliste dans le contexte suisse : par quels scénarios spécifiques la Suisse est-elle concernée ? Cela entraîne des questions qui n'ont pas non plus été évoquées sur le plan politique, comme, par exemple, sur l'utilisation en air-sol. Il s'agit aussi d'évoquer la division inévitable des tâches entre nous et les voisins, pour savoir comment la sécurité optimale peut être obtenue dans le cadre d'une coopération.
Le F-35 a un profil différent de celui dont nous avons besoin :
Les déficiences du F-35 dans la mission de police du ciel : en terme d'intervention rapide (jargon technique « QRA ») le F-35 est bien moins efficace que ses concurrents européens Eurofighter et Rafale. Le temps requis par le F-35 pour intercepter un avion à 11 000 mètres (altitude de vol typique des avions commerciaux) est au moins 50 pour cent supérieur à celui d'un chasseur standard haute performance. Il lui faut plus d'une minute de plus par rapport à la concurrence. Dans la guerre aérienne, c'est une éternité. Le F-35 ne peut être choisi sur la base de ce seul critère, où la concurrence le surclasse. La furtivité du F-35 ne joue en effet qu'un rôle mineur dans les missions de défense aérienne .
Le F-35 est conçu pour des scénarios de guerre aérienne air-sol complexes et en réseau (missions de bombardements) avec plusieurs avions. Une telle flotte de F-35 dépend du soutien de divers autres moyens, tels que des avions de reconnaissance, des avions d'alerte lointaine ("AWACS"), des avions de reconnaissance à haute altitude ("HALE"), des avions ravitailleurs, des satellites et - selon la menace dans la zone cible - des chasseurs d'escorte. Il s'agit d'une association classique au sein de l'OTAN, pour des missions de l'OTAN. La Suisse n'aura jamais à effectuer ce genre de mission sur son sol.
Cela n'aurait de sens que si les Forces aériennes suisses participaient également à des missions "hors zone" (déploiements bien au-delà des frontières nationales, éventuellement avec relocalisation de l'avion), pour notre propre sécurité et celle d'autres pays européens avec qui nous interviendrions à la périphérie de l'Europe, c'est-à-dire là où surgissent de réelles menaces militaires, et pas sur notre territoire.
Dépendance importante à l'égard des États-Unis :
Dans le cadre d'une intégration à des missions de l'OTAN mentionnées ci-dessus, une dépendance totale à l'égard de l'industrie américaine et du département américain de la Défense (DoD) apparaît. Le contrôle concerne plus particulièrement l'outil le plus important de la mise en réseau, le très secret "MADL" Datalink. Cela signifie que le F-35 n'est pas directement compatible avec les avions d'autres pays européens comme l'Eurofighter, le Rafale, le F-16, le Gripen, etc. - mais seulement de façon limitée via la liaison 16 conventionnelle.
Contrairement à l'exploitation du F-16 dans les petits pays de l'OTAN, les États-Unis exploitent le F-35 séparément avec chaque pays et entravent ainsi la coopération et l'échange de données entre ces autres pays.
Calcul de coût opaque ?
Le rapport de la NZZ, selon lequel le F-35 (selon Armasuisse) a des coûts d'exploitation bien inférieurs à ceux de la concurrence, est apparemment basé sur la simulation du F-35, qui permet d'économiser des heures de vol.
Sur quelle base ce résultat est-il obtenu ? des rapports réalisés par le fabricant Lockheed-Martin. S'il n'a pas été demandé aux trois autres concurrents d'effectuer des offres sur les mêmes bases, le ministère de la Défense aurait un vrai problème. Parce que tous les autres concurrents disposent aussi d'importantes installations de simulation avec lesquelles les heures de vol et donc les coûts d'exploitation de l'ensemble de la flotte peuvent être considérablement réduits. Sinon, cela signifierait que des faiblesses du F-35 mises en perspectives pourraient être compensées par le coût inférieur des heures de vol. Ce serait absurde.
Aujourd'hui, en matière de coûts d'exploitation, il n'est pas possible de se fier aux seules déclarations d'un constructeur. Le fabricant A est-il plus honnête que le fabricant B ? Les informations sur l'évolution future des coûts des heures de vol doivent être rendus accessibles de la part de tous les concurrents et présentées de manière totalement transparente.
Que se passe-t-il si ces coûts s'avèrent plus tard plus élevés qu'initialement annoncé dans l'offre ? Il est totalement impossible de fournir des informations prospectives sur les coûts liés au développement en cours d'un système (ce qu'on appelle les « mises à niveau »). Comme on peut le voir dans toute la presse spécialisée, ainsi que de la part des autorités nationales de contrôle, des surcoûts en découlent - d'où une controverse et des critiques envers le F-35, y compris de la part d'un ancien ministre américain de la Défense.
Un exemple : La mise à niveau du bloc 4 pour les 48 F-35 de la RAF / Royal Air Force (logiciel, intégration d'armes) coûte à elle seule entre 1 et 2 milliards £. Conséquence : le Royaume-Uni ne peut pas se permettre plus que ses 48 F-35B pour le moment et équipe donc ses deux gros porte-avions avec seulement 24 unités pour chacun. Mais, un certain nombre d'avions devant rester à terre pour la maintenance, la formation et les diverses mises à niveau, les effectifs réels sont encore plus limités.
Si le ministère de la Défense ne s'appuie que sur les informations du constructeur, l'exercice est improductif.
Des organismes de contrôle inefficaces ?
Ces faits non encore confirmés soulèvent des questions sur le professionnalisme de l'évaluation. Quelle est l'efficacité des organismes de contrôle des achats d'armements ? Comment fut-il possible que toutes les autorités (Armasuisse, état-major de l'armée, politique, parlements) aient entériné le choix du Gripen sans résistance, alors qu'il était déjà manifeste à l'époque (2013) que cet achat n'était pas réaliste ? Nous aurions dû recevoir le premier avion en 2018. Or, le premier avion ne sera livré en Suède qu'en 2023 (déclaration de l'armée de l'air suédoise en janvier 2021). Cela aurait doublé nos délais de livraison, les faisant passer de 5 à 10 ans. Il ne s'agit pas de la qualité du Gripen E, qui aurait suffi à nos services s'il avait existé...
De toute évidence, il manque en Suisse les organismes de contrôle nécessaires, comme il en existe à l'étranger : aux USA le GAO (General Accounting Office) et les audiences du congrès, en Allemagne le Contrôle fédéral des finances et les très efficaces commissions parlementaires de la défense et du budget. En France, il existe un certain nombre d'organes de contrôle tels que la Cour des comptes, l'Inspection générale des armées et les commissions parlementaires.
En Suisse, il existe des commissions et des comités de sécurité et de politique financière. Mais les moyens de contrôle sont manifestement sous-développés.
Conclusion
Aujourd'hui, le débat sur le nouvel avion est beaucoup trop orienté sur le combat aérien et les missions air-sol. Depuis des décennies, l'«urgence» de l'armée de l'air suisse a été la mission de police du ciel et l'établissement temporaire de zones de protection lors de conférences internationales et de grands événements.
Il y a toujours des scénarios guerriers, mais à la périphérie de l'Europe. Des conditions de guerre aérienne au-dessus de l'Europe occidentale sont peu probables.
La transition de la police du ciel à la guerre aérienne est fluide. Dans tous les cas, si la Suisse devait éventuellement être mêlée à un conflit aérien, cela nécessiterait une coopération pleine et entière avec les pays voisins.
Même si les avions travaillant en réseau, comme F-35, promettent un haut niveau d'efficacité dans les opérations air-sol (bombardement), il est incompréhensible que cette capacité soit prioritaire pour l'armée de l'air. Cette capacité n'a été considérée que comme un aspect marginal lors des projets d'armement précédents, y compris lors des référendums.
L'évaluation de l'avion de combat devrait être effectuée par des sociétés professionnelles indépendantes dans les domaines stratégie, technologie, économie, questions militaires et politique. Parce qu'on ne peut pas imaginer que les politiciens et le peuple seront convaincus par un choix discutable en faveur du F-35.