Article OPEX 360 du 13 décembre, avec le titre : Allemagne : À son tour, la base aérienne de Ramstein a été survolée par des drones inconnus
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Tant en Europe qu’aux États-Unis, des infrastructures sensibles, comme les sites militaires et les centrales nucléaires, sont survolées par des drones non identifiés depuis au moins 2015. Ce phénomène semble avoir pris un tour nouveau depuis l’an passé. En effet, durant le mois de décembre 2023, la base aérienne de Langley [Virginie], qui abrite notamment les avions de combat F-22A Raptor, a été survolée par des drones relativement imposants et ayant la capacité d’évoluer en essaim, à au moins dix-sept reprises. À ce jour, leur origine demeure inconnue. « Compte tenu de sa complexité, les autorités américaines estiment que des amateurs, même éclairés, ne pouvaient pas être à l’origine d’une telle opération » d’autant plus que les drones « n’utilisaient pas les fréquences habituellement mises à la disposition des appareils ‘grand public' », a récemment avancé le Wall Street Journal, à l’occasion d’une enquête sur ce sujet.
Un an plus tard, c’est au tour du New Jersey d’être survolé régulièrement par des drones inconnus. « Ils ont une apparence si étrange et ils sont beaucoup plus gros que les drones normaux. Je comprends pourquoi tout le monde panique maintenant… Je pense que c’est un peu effrayant », a confié un témoin de ces apparitions à CNN. Cette « nouvelle vague » a commencé le 18 novembre dernier, avec le survol du « Picatinny Arsenal », un site dédié à la mise au point des nouveaux équipements de l’US Army, par plusieurs drones de « grande taille ». Un parcours de golf appartenant au président Trump a également eu droit aux mêmes égards. Et depuis, les observations se multiplient…
Cela étant, la Maison Blanche a relativisé l’importance de ce phénomène, tout en affirmant que « le département de la Sécurité intérieure et le FBI » suivaient cette « affaire de près ». Il n’y a « aucune preuve que les drones signalés constituent une menace pour la sécurité nationale ou la sécurité publique, ou qu’il y ait un lien avec l’étranger », a ainsi affirmé John Kirby, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale, le 12 décembre. Et d’ajouter : « Nous n’avons pas été en mesure de corroborer les observations visuelles signalées. Au contraire, il apparaît qu’un grand nombre de celles-ci sont en réalité des aéronefs pilotés qui volent en toute légalité ».
Certes, certaines observations peuvent être douteuses… Mais pour les autorités locales, ces drones inconnus sont bel et bien réels. « Ils opèrent de manière coordonnée. Leurs feux de position sont généralement allumés et clignotent. Mais ils s’éteignent parfois, ce qui les rend très difficiles à détecter. Lorsqu’un hélicoptère de la police d’État s’en approche, leurs feux de position s’éteignent et ils s’en vont. Ce qui rend les choses très, très difficiles. Nous ne connaissons ni le fabricant ni le modèle. Nous ne savons rien d’autre à leur sujet », a témoigné Michael Melham, maire de Belleville Township, après avoir assisté à un « briefing » sur ces apparitions.
Quoi qu’il en soit, ces vols de drones coïncident avec ceux récemment observés près des bases aériennes de Lakenheath, de Mildenhall et Felwell, utilisées par l’US Air Force au Royaume-Uni. Les enquêtes ouvertes par les autorités britanniques et américaines sont toujours en cours et il n’est pas certain que les conclusions soient rendues publiques, tant la communication autour de ces incursions est « cadenassée ». Cependant, des sources proches des milieux de la défense ont confié à la BBC que des soupçons « pesaient sur un acteur étatique ».
L’Allemagne est également confrontée à un phénomène identique. Outre les cas recensés près des sites de la Bundeswehr accueillant les formations données aux troupes ukrainiennes, il a été rapporté, en août dernier, que la zone industrielle « ChemCoast Park », à Brunsbüttel [Schleswig-Holstein], avait été survolée à plusieurs reprises, et « à grande vitesse », par des drones inconnus. Le parquet de Flensbourg a d’ailleurs lancé une enquête portant sur une « suspicion d’activité d’agents à des fins de sabotage », avec l’appui de l’Office fédéral de la police criminelle [BKA] et celui de la Bundeswehr. D’après le quotidien Bild, les enquêteurs pensaient alors avoir affaire à des drones de qualité militaire, comme le Orlan-10 de conception russe. Et ils privilégiaient l’hypothèse selon laquelle ces engins étaient mis en œuvre depuis des navires civils croisant en mer du Nord.
Depuis, selon les médias allemands WDR et NDR, des usines liées à l’industrie pétrochimique, implantées dans le sud de l’Allemagne, ont également été survolées par des drones, similaires à ceux observés à Brunsbüttel. « Des drones auraient été repérés à plusieurs reprises au-dessus des locaux de l’entreprise BASF à Ludwigshafen ces dernières semaines. Selon les recherches, comme à Brunsbüttel cet été, les survols s’effectuent durant la nuit. Les drones seraient également nettement plus gros que ceux qui, disponibles dans le commerce, sont utilisés par les télépilotes amateurs », ont-ils affirmé.
Si les sites de l’industrie pétrochimique allemande suscitent l’intérêt de drones inconnus, il en va de même pour la base aérienne de Ramstein, qui abrite notamment le quartier général européen de l’US Air Force. C’est ce qu’a en effet révélé l’hebdomadaire Der Spiegel, qui a aussi évoqué des survols de drones inconnus au-dessus des installations du groupe de défense Rheinmetall. « Selon un rapport confidentiel des autorités allemandes, de nombreuses observations de drones ont eu lieu les 3 et 4 décembre au-dessus du vaste complexe militaire américain, qui sert de plaque tournante pour les opérations des États-Unis en Europe », a en effet indiqué Der Spiegel.
L’US Air Force a confirmé cette information. « Début décembre, des drones ont été repérés à proximité et au-dessus de la base sans provoquer de perturbations », a dit un porte-parole. « En coopération avec les autorités du pays hôte, nous continuons à surveiller l’espace aérien pour assurer la sécurité de la population », a-t-il poursuivi. « Le public est également invité à informer la police allemande ou les forces armées américaines s’il observe quelque chose de suspect », a-t-il conclu.
Question : pourquoi ne pas utiliser des drones anti-drones, comme en Ukraine, prépositionnés sur les sites sensibles ou, au moins, sur les bases aériennes ?