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L'essentiel des affaires de corruption reprochées au constructeur aéronautique n'aurait guère alerté qui que ce soit dans les années 2000. Ce sont les nouvelles réglementations sur l'obtention de crédits export qui ont obligé Airbus à se pencher sur ses failles. Et notamment sur l'omission et les inexactitudes concernant l'identité et le rôle de certains intermédiaires d'Airbus dans la conclusion de contrats civils et militaires, un problème découvert début 2014 par le constructeur. Le gros des enquêtes porte sur des irrégularités commises entre 2008 et 2013.
Or, la pratique déroge à la réglementation des agences gouvernementales de crédits export européennes. Car en échange des prêts garantis consentis, le constructeur aéronautique est obligé de mentionner les intermédiaires concernés par ces contrats, sous peine de s'exposer à des poursuites pénales.
Convaincu que les Etats-Unis se serviraient tôt ou tard de ces « irrégularités » contre Airbus, l'ancien patron du groupe Tom Enders avait demandé en 2015 de suspendre le recours aux intermédiaires, d'abord sur la Chine, puis partout dans le monde, après la découverte d'un incident en Turquie. Il a ensuite lancé une vaste opération de transparence auprès des agences gouvernementales, dans l'espoir de négocier une amende pour solder le litige et éviter une condamnation qui lui aurait barré l'accès aux marchés publics de très nombreux pays.
A la suite des éléments transmis par Airbus, le Serious Fraud Office (SFO) britannique a déclenché en juillet 2016 une enquête sur des soupçons de fraude. Imité un an plus tard par le parquet national financier français qui ouvre une enquête préliminaire et annonce coopérer avec le SFO.
L'enquête bilatérale franco-britannique est par la suite devenue trilatérale avec l'arrivée du département de la Justice américain , qui s'est saisi de l'affaire sur un aspect réglementaire différent de l'affaire initiale : Airbus aurait négligé certaines déclarations auprès des autorités américaines en matière de vente d'armes concernant la réglementation ITAR (Traffic in Arms Regulations). Cette réglementation est un redoutable outil des Américains pour étendre leur législation de manière extraterritoriale, puisqu'il s'agit de laisser aux Etats-Unis l'autorisation ou non d'exportation de tout matériel de combat, dès lors qu'il détient un composant, aussi petit soit-il, fabriqué aux Etats-Unis.