Conclusion de la campagne ARR des LAL.
Publié : mar. mars 13, 2007 4:12 pm
Suite à la dernière mission de la campagne Roumaine des LAL (en IAR, 1944 sur carte Balaton), voici un petit récit de conclusion pour achever la campagne :
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Le paysage défile assez vite. Forêts, villages et ponts se succèdent régulièrement. Le ronronnement du moteur est très régulier et devient sourd lorsqu’il peine, notamment lors des montées. Nikolas Ghiniolescu (GUIGNOL) se penche vers la vitre et reconnaît les berges Nord du Lac Balaton. Tapolca ne doit pas être loin. Une odeur caractéristique, identique au bord de mer commence à se faire sentir.
Quelques minutes s’écoulent. Le régime moteur semble diminuer pour finalement tourner au ralenti. Le crissement des freins se fait ensuite entendre. Nikolas se lève de son fauteuil pour attraper son sac suspendu dans un filet juste au dessus de lui. Il se dirige vers l’avant. Le chauffeur se retourne et lui dit :
- « C’est bien ici Monsieur, Tapolca ! Faites attention à la marche pour descendre. Vous voulez un coup de main ? »
Nikolas répond négativement de la tête. Ses jambes le font souffrir, mais la douleur reste surmontable. Il descend lentement du bus. Il marche sur le trottoir. Il fait encore très chaud en ce mois de septembre et la fraîcheur à l’intérieur de l’autocar était trompeuse. Le ciel est complètement dégagé. Un avion monoplan se dirige vers Sofiok. Nikolas tente de l’identifier. Sa vue n’est pas très bonne et à l’écoute du moteur, il s’agit sûrement d’un avion quadriplace pour touristes. C’est alors qu’une mélodie stridente se fait entendre. Nikolas fouille la poche gauche de sa veste et sort un téléphone portable qu’il allume :
- « Allo ? »
- « … … »
- « Oui, je viens tout juste d’arriver. Il fait très chaud. Ca n’a finalement pas trop changé. »
- « … … »
- « Oui, j’ai bien l’adresse, je vais marcher un peu et essayer de trouver tout seul. »
- « … … … »
- « Mais non, ne t’inquiète pas ma fille, je connais la région. Je te rappelle ce soir depuis l’hôtel. »
Il raccroche...
Et d’un seul coup, Nikolas se rend compte ce que tout ceci représente pour lui. La douleur de toutes ces années de guerre lui ressurgit au visage comme un chien enragé. Nous sommes en 1989, et Ghiniolescu a beau avoir bientôt 68 ans, tous les souvenirs restent intacts, comme inscrits sur une dalle de marbre. Rien ne peut les altérer...
Il reprend sa marche comme pour balayer sa tête de ces pensées obscures. Au bout d’une centaine de mètres, la vue se dégage sur le Lac. Tapolca est bien visible. On peut même apercevoir le plateau au Sud-Ouest de la ville où avait été construit la base.
Cette fameuse base de Tapolca qui avait accueilli les pilotes du 1V le 17 août 1944. Une équipe allemande de réapprovisionnement avait été dépêchée sur place pour eux. Il se rappelle de Vulpescu (FOX) qui hurlait à la radio des insanités aux germains qui gérait la tour de Tapolca. Les pauvres teutons ne comprenaient rien !!! C’était à l’occasion de l’attaque de la base BBk. Ah oui, ces satanés navires BBk… Une grande opération avait été menée contre eux. Les pilotes avaient été épuisés par près de 2 jours de vols non-stop. Il y avait eu d’abord la mission de reconnaissance au Sud du Lac pour trouver cette base. Puis un Fw-189 avait décollé pour prendre des clichés afin d’organiser une attaque précise. Aucun avion ennemi n’avait été rencontré durant cette reconnaissance photographique. Ce fut finalement, avec le recul, le seul temps mort de ces 48 heures !!! L’opération avait été interrompue dans la matinée car des navires BBk avaient attaqué les troupes roumaines stationnées à Keszthel. Iliescu (LOWENDAL) avait d’ailleurs réussi à placer une bombe de 250 kg sur un de ces bateaux. 250 kg d’explosive sur une embarcation d’à peine 10 mètres de long, même blindée… il ne reste rien.
Puis vint l’attaque de la base aux abords de Sofiok. Et cette fameuse halte à Tapolca. L’escadrille avait bien dégusté. Ghiuela (DORNS) ne put d’ailleurs pas participer au 3e assaut car il fut déstabilisé par le poids de sa bombe au décollage et avait fini dans les champs sans trains d’atterrissage. La bombe n’avait, par chance, pas explosé !!! Le raid sur la base fut d’une efficacité redoutable. Les Russes ne remirent en effet aucun navire d’assaut sur le Lac Balaton.
Mais les renforts soviétiques ne cessaient d’arriver dans le secteur. Et c’est la raison pour laquelle la gare de Mernye devait être détruite. Elle abritait en fait un camp de déversement de troupes avant d’être envoyées au front. La 1V a du encore une fois intervenir sur un site ultra protégé où la gestion en carburant fut vitale. Il fallait attaquer à la bombe les bunkers protégeant la gare pour ensuite aller escorter à haute altitude des Ju-88 qui étaient chargés de bombes destinées au campement.
Mais le front Hongrois ce n’était pas seulement combattre l’aviation russe. Les pilotes américains étaient aussi de la partie. Fréquemment des quadrimoteurs déversaient leurs bombes sur nos raffineries pétrolifères. Les vieux IAR étaient alors envoyé traquer les B17 et autres B24 isolés ou déjà endommagés par les Messerschmitt de la LuftWaffe. C’est à cette occasion que les pilotes roumains ont pu se frotter avec les redoutables P-38 et P-47. La 1V en avait même descendu quelques uns ! Finalement la vie à Rovnoye était très agitée, et les pilotes ne savaient plus où donner de la tête. Vassiliescu (CORSO) s’était d’ailleurs tailler une sacrée réputation de destructeur de bombardiers US, et ceci dans tous les types d’attaques : frontales, arrières, par en dessous …
Les missions s’enchaînaient à un rythme effréné. Et les journées défilaient à une vitesse hallucinante. Le mois d’août arrivant à son terme, les Roumains allait être marquer coup sur coup par deux dates importantes.
Le 22 août, d’abord, fut le jour choisi par les Soviétiques pour lancer leur grande offensive sur la Hongrie. Ces derniers avaient accumulé tant de renforts au sud du Lac Balaton que la date fatidique d’une telle attaque était prévisible depuis de nombreux jours. Et dès la fin d’après-midi, il était demandé à l’escadrille d’intervenir directement sur le front. Des canons de 152 mm russes pilonnaient nos installations autour du Petit Balaton. Il fallait absolument les faire taire. Tache que la 1V s’est parfaitement acquittée, malgré un départ en catastrophe de Donja Dubrava, alors bombardé par des Pe-2. Gribzarescu (FRANCIS) très chanceux, prit d’ailleurs l’air en zigzaguant entre les bombes de 100 kg ! Mais l’essentiel était fait : les canons ennemis furent hors d’état. Cette mission scellait également une coopération importante entre les IAR-81 et les Henschel 129 ; travail d’équipe qui ne cesserait plus d’ailleurs à la vue des résultats très encourageant.
Le 23 août 1944 fut une date qui resta à jamais gravée dans le cœur de tous les Roumains qui ont vécu cette journée. Qu’ils furent combattants sur le front, aviateurs, prisonniers ou simplement femmes essayant de faire manger ses enfants chaque jour, le peuple Roumain comprit à quel point une politique de guerre peut devenir absurde. Le Roi Michel, oppressé et acculé par l’envahisseur soviétique, se résigne à capituler et à offrir les services de son armée pour repousser les Forces de l’Axe. L’ennemi devint allié, et les anciennes armées co-belligérantes mutèrent en animal traqué et fuyant vers l’Allemagne. Cette situation abracadabrante permit aux Roumains de remettre la main sur des territoires nationaux perdus quelques années auparavant lors de l’annexion du pays aux armées nazies. C’est ainsi qu’au prix d’une violente campagne, la Hongrie fut contrainte de se retirer.
L’escadrille 1V devenait un fardeau pour la 5e Armée Rouge qui n’y voyait qu’un ramassis de matériel obsolète. C’est pourquoi le rôle de chasseur fut abandonné au profit de celui de bombardier d’assaut, plus en phase avec les possibilités tactiques de l’IAR-81c. Toujours en réitérant le travail d’équipe entre IAR et Hs-129, la première mission « prorusse » fut d’attaquer les mines de fer hongroises situées au nord du secteur. Tache que l’escadrille s’acquitta avec brio. Ce fut l’occasion aussi pour les pilotes de se mesurer aux avions hongrois riche en équipement dernier cri. Les affrontements avec les Me-210 furent néanmoins portés à l’avantage des IAR.
Littéralement empalé par l’Armée Rouge, les Hongrois ne tinrent pas longtemps et les troupes portant la croix banche se retira rapidement. Les IAR reprirent alors du service pour harceler l’évacuation aérienne ennemi, jusqu’au jour du 21 septembre 1944. Cet ultime vol mis fin à l’activité de l’escadrille 1 Vanataore/Bopi. Le matériel Hongrois nettement supérieur aura eu raison des vieux IAR datant de 1937. Sur les 6 pilotes décollant ce matin là à 7h00, la moitié de revint pas.
En se remémorant ces instants, Nikolas Ghiniolescu (GUIGNOL) sent son cœur se serrer comme pris dans un étau. Il eut beaucoup de chance ce jour là. A court de carburant, il fut contraint de poser son appareil en pleine campagne à plus de 30 km du front. Il resta cacher cinq jours durant, en évitant les colonnes de Panzers Hongrois fuyant la région, en se déplaçant uniquement de forêts en forêts pour ne pas être vu, en volant de la nourriture aux fermiers qu’il croisait. Il fut récupéré par une escouade russe qui le prit d’abord pour un soldat Hongrois. Une fois son identité prouvée, il se croyait tiré d’affaire, mai en vain. Il fut incarcéré pendant trois ans pour avoir affronté les troupes soviétiques de 1939 à 1944, période durant laquelle il combattait aux côtés des Allemands. Puis il fut remis au gouvernement Roumains en 1947. Il découvrit alors son pays encore dévasté par la guerre et complètement asservi par le régime communiste ultra sévère. Staline avait donné des consignes très dures à l’encontre du peuple Roumains pour les punir de l’alliance avec Hitler. Cela ne cesserait donc jamais…
Il apprit beaucoup plutard, en effectuant des recherches personnelles, que les deux autres survivants de ce dernier vol, Iliescu (LOWENDAL) et Vulpescu (FOX) étaient décédés depuis longtemps. Iliescu fut jugé et exécuté à la peine capitale par un tribunal militaire soviétique pour crime contre l’URSS. Vulpescu, quant à lui, fut abattu au pied de son IAR alors qu’il tentait de fuir lors de leurs arrestations. Tout ceci se passa dans les jours qui ont suivi l’armistice du 8 mai 1945. Armistice, cessez-le-feu … ces mots ne veulent plus rien dire dans la tête de Ghiniolescu.
Mais aujourd’hui est un jour spécial. Il l’apprit par hasard en écoutant son poste radio FM. Le Capitan Davidescu est mort à l’âge de 79 ans. Il sera enterré cet après-midi au cimetière de Tapolca. Il se devait d’y être. Cela ne pouvait se passer autrement. Son ancien chef d’escadrille, sans famille, était resté en Hongrie nouvellement conquise par les Russes. Il sut garder une vie très discrète, tout du moins assez pour ne pas lui attirer d’ennuis. Il était connu jusqu’à ce jour à Tapolca pour un chef d’orchestre hors pair…
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Quelques clichés de la région du Lac Balaton aujourd’hui, tel qu’a pu le redécouvrir Nikolas Ghiniolescu.
La ville de TAPOLCA. Au fond à droite, le plateau rocheux qui abritait la base du même nom. Au fond, on distingue le Lac Balaton.
La Base BBk aujourd'hui (authentique !!!). La ville de Sofiok profite toujours de ces 3 petites criques naturelles situées au Sud de la ville pour y abripter des bateaux, ... de plaisance cette fois !
La ville de Zalakaros, au bord du Petit Balaton où était situé les canons de 152 mm.
La Base de Bàbolna a été transformé un centre de dressage hippique, reconnue dans toute la Hongrie... (authentique).
Une photo de l'extrémité Nord-Est du Lac Balaton prise depuis la péninsule de Tihany (qui coupe presque le lac en deux). Lors du raid nocturne sur la Base BBk, la ville était en feu.
Baissé de rideau sur le Lac Balaton, aujourd'hui, un soir de fin d'été, comme en septembre 1944...
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Le paysage défile assez vite. Forêts, villages et ponts se succèdent régulièrement. Le ronronnement du moteur est très régulier et devient sourd lorsqu’il peine, notamment lors des montées. Nikolas Ghiniolescu (GUIGNOL) se penche vers la vitre et reconnaît les berges Nord du Lac Balaton. Tapolca ne doit pas être loin. Une odeur caractéristique, identique au bord de mer commence à se faire sentir.
Quelques minutes s’écoulent. Le régime moteur semble diminuer pour finalement tourner au ralenti. Le crissement des freins se fait ensuite entendre. Nikolas se lève de son fauteuil pour attraper son sac suspendu dans un filet juste au dessus de lui. Il se dirige vers l’avant. Le chauffeur se retourne et lui dit :
- « C’est bien ici Monsieur, Tapolca ! Faites attention à la marche pour descendre. Vous voulez un coup de main ? »
Nikolas répond négativement de la tête. Ses jambes le font souffrir, mais la douleur reste surmontable. Il descend lentement du bus. Il marche sur le trottoir. Il fait encore très chaud en ce mois de septembre et la fraîcheur à l’intérieur de l’autocar était trompeuse. Le ciel est complètement dégagé. Un avion monoplan se dirige vers Sofiok. Nikolas tente de l’identifier. Sa vue n’est pas très bonne et à l’écoute du moteur, il s’agit sûrement d’un avion quadriplace pour touristes. C’est alors qu’une mélodie stridente se fait entendre. Nikolas fouille la poche gauche de sa veste et sort un téléphone portable qu’il allume :
- « Allo ? »
- « … … »
- « Oui, je viens tout juste d’arriver. Il fait très chaud. Ca n’a finalement pas trop changé. »
- « … … »
- « Oui, j’ai bien l’adresse, je vais marcher un peu et essayer de trouver tout seul. »
- « … … … »
- « Mais non, ne t’inquiète pas ma fille, je connais la région. Je te rappelle ce soir depuis l’hôtel. »
Il raccroche...
Et d’un seul coup, Nikolas se rend compte ce que tout ceci représente pour lui. La douleur de toutes ces années de guerre lui ressurgit au visage comme un chien enragé. Nous sommes en 1989, et Ghiniolescu a beau avoir bientôt 68 ans, tous les souvenirs restent intacts, comme inscrits sur une dalle de marbre. Rien ne peut les altérer...
Il reprend sa marche comme pour balayer sa tête de ces pensées obscures. Au bout d’une centaine de mètres, la vue se dégage sur le Lac. Tapolca est bien visible. On peut même apercevoir le plateau au Sud-Ouest de la ville où avait été construit la base.
Cette fameuse base de Tapolca qui avait accueilli les pilotes du 1V le 17 août 1944. Une équipe allemande de réapprovisionnement avait été dépêchée sur place pour eux. Il se rappelle de Vulpescu (FOX) qui hurlait à la radio des insanités aux germains qui gérait la tour de Tapolca. Les pauvres teutons ne comprenaient rien !!! C’était à l’occasion de l’attaque de la base BBk. Ah oui, ces satanés navires BBk… Une grande opération avait été menée contre eux. Les pilotes avaient été épuisés par près de 2 jours de vols non-stop. Il y avait eu d’abord la mission de reconnaissance au Sud du Lac pour trouver cette base. Puis un Fw-189 avait décollé pour prendre des clichés afin d’organiser une attaque précise. Aucun avion ennemi n’avait été rencontré durant cette reconnaissance photographique. Ce fut finalement, avec le recul, le seul temps mort de ces 48 heures !!! L’opération avait été interrompue dans la matinée car des navires BBk avaient attaqué les troupes roumaines stationnées à Keszthel. Iliescu (LOWENDAL) avait d’ailleurs réussi à placer une bombe de 250 kg sur un de ces bateaux. 250 kg d’explosive sur une embarcation d’à peine 10 mètres de long, même blindée… il ne reste rien.
Puis vint l’attaque de la base aux abords de Sofiok. Et cette fameuse halte à Tapolca. L’escadrille avait bien dégusté. Ghiuela (DORNS) ne put d’ailleurs pas participer au 3e assaut car il fut déstabilisé par le poids de sa bombe au décollage et avait fini dans les champs sans trains d’atterrissage. La bombe n’avait, par chance, pas explosé !!! Le raid sur la base fut d’une efficacité redoutable. Les Russes ne remirent en effet aucun navire d’assaut sur le Lac Balaton.
Mais les renforts soviétiques ne cessaient d’arriver dans le secteur. Et c’est la raison pour laquelle la gare de Mernye devait être détruite. Elle abritait en fait un camp de déversement de troupes avant d’être envoyées au front. La 1V a du encore une fois intervenir sur un site ultra protégé où la gestion en carburant fut vitale. Il fallait attaquer à la bombe les bunkers protégeant la gare pour ensuite aller escorter à haute altitude des Ju-88 qui étaient chargés de bombes destinées au campement.
Mais le front Hongrois ce n’était pas seulement combattre l’aviation russe. Les pilotes américains étaient aussi de la partie. Fréquemment des quadrimoteurs déversaient leurs bombes sur nos raffineries pétrolifères. Les vieux IAR étaient alors envoyé traquer les B17 et autres B24 isolés ou déjà endommagés par les Messerschmitt de la LuftWaffe. C’est à cette occasion que les pilotes roumains ont pu se frotter avec les redoutables P-38 et P-47. La 1V en avait même descendu quelques uns ! Finalement la vie à Rovnoye était très agitée, et les pilotes ne savaient plus où donner de la tête. Vassiliescu (CORSO) s’était d’ailleurs tailler une sacrée réputation de destructeur de bombardiers US, et ceci dans tous les types d’attaques : frontales, arrières, par en dessous …
Les missions s’enchaînaient à un rythme effréné. Et les journées défilaient à une vitesse hallucinante. Le mois d’août arrivant à son terme, les Roumains allait être marquer coup sur coup par deux dates importantes.
Le 22 août, d’abord, fut le jour choisi par les Soviétiques pour lancer leur grande offensive sur la Hongrie. Ces derniers avaient accumulé tant de renforts au sud du Lac Balaton que la date fatidique d’une telle attaque était prévisible depuis de nombreux jours. Et dès la fin d’après-midi, il était demandé à l’escadrille d’intervenir directement sur le front. Des canons de 152 mm russes pilonnaient nos installations autour du Petit Balaton. Il fallait absolument les faire taire. Tache que la 1V s’est parfaitement acquittée, malgré un départ en catastrophe de Donja Dubrava, alors bombardé par des Pe-2. Gribzarescu (FRANCIS) très chanceux, prit d’ailleurs l’air en zigzaguant entre les bombes de 100 kg ! Mais l’essentiel était fait : les canons ennemis furent hors d’état. Cette mission scellait également une coopération importante entre les IAR-81 et les Henschel 129 ; travail d’équipe qui ne cesserait plus d’ailleurs à la vue des résultats très encourageant.
Le 23 août 1944 fut une date qui resta à jamais gravée dans le cœur de tous les Roumains qui ont vécu cette journée. Qu’ils furent combattants sur le front, aviateurs, prisonniers ou simplement femmes essayant de faire manger ses enfants chaque jour, le peuple Roumain comprit à quel point une politique de guerre peut devenir absurde. Le Roi Michel, oppressé et acculé par l’envahisseur soviétique, se résigne à capituler et à offrir les services de son armée pour repousser les Forces de l’Axe. L’ennemi devint allié, et les anciennes armées co-belligérantes mutèrent en animal traqué et fuyant vers l’Allemagne. Cette situation abracadabrante permit aux Roumains de remettre la main sur des territoires nationaux perdus quelques années auparavant lors de l’annexion du pays aux armées nazies. C’est ainsi qu’au prix d’une violente campagne, la Hongrie fut contrainte de se retirer.
L’escadrille 1V devenait un fardeau pour la 5e Armée Rouge qui n’y voyait qu’un ramassis de matériel obsolète. C’est pourquoi le rôle de chasseur fut abandonné au profit de celui de bombardier d’assaut, plus en phase avec les possibilités tactiques de l’IAR-81c. Toujours en réitérant le travail d’équipe entre IAR et Hs-129, la première mission « prorusse » fut d’attaquer les mines de fer hongroises situées au nord du secteur. Tache que l’escadrille s’acquitta avec brio. Ce fut l’occasion aussi pour les pilotes de se mesurer aux avions hongrois riche en équipement dernier cri. Les affrontements avec les Me-210 furent néanmoins portés à l’avantage des IAR.
Littéralement empalé par l’Armée Rouge, les Hongrois ne tinrent pas longtemps et les troupes portant la croix banche se retira rapidement. Les IAR reprirent alors du service pour harceler l’évacuation aérienne ennemi, jusqu’au jour du 21 septembre 1944. Cet ultime vol mis fin à l’activité de l’escadrille 1 Vanataore/Bopi. Le matériel Hongrois nettement supérieur aura eu raison des vieux IAR datant de 1937. Sur les 6 pilotes décollant ce matin là à 7h00, la moitié de revint pas.
En se remémorant ces instants, Nikolas Ghiniolescu (GUIGNOL) sent son cœur se serrer comme pris dans un étau. Il eut beaucoup de chance ce jour là. A court de carburant, il fut contraint de poser son appareil en pleine campagne à plus de 30 km du front. Il resta cacher cinq jours durant, en évitant les colonnes de Panzers Hongrois fuyant la région, en se déplaçant uniquement de forêts en forêts pour ne pas être vu, en volant de la nourriture aux fermiers qu’il croisait. Il fut récupéré par une escouade russe qui le prit d’abord pour un soldat Hongrois. Une fois son identité prouvée, il se croyait tiré d’affaire, mai en vain. Il fut incarcéré pendant trois ans pour avoir affronté les troupes soviétiques de 1939 à 1944, période durant laquelle il combattait aux côtés des Allemands. Puis il fut remis au gouvernement Roumains en 1947. Il découvrit alors son pays encore dévasté par la guerre et complètement asservi par le régime communiste ultra sévère. Staline avait donné des consignes très dures à l’encontre du peuple Roumains pour les punir de l’alliance avec Hitler. Cela ne cesserait donc jamais…
Il apprit beaucoup plutard, en effectuant des recherches personnelles, que les deux autres survivants de ce dernier vol, Iliescu (LOWENDAL) et Vulpescu (FOX) étaient décédés depuis longtemps. Iliescu fut jugé et exécuté à la peine capitale par un tribunal militaire soviétique pour crime contre l’URSS. Vulpescu, quant à lui, fut abattu au pied de son IAR alors qu’il tentait de fuir lors de leurs arrestations. Tout ceci se passa dans les jours qui ont suivi l’armistice du 8 mai 1945. Armistice, cessez-le-feu … ces mots ne veulent plus rien dire dans la tête de Ghiniolescu.
Mais aujourd’hui est un jour spécial. Il l’apprit par hasard en écoutant son poste radio FM. Le Capitan Davidescu est mort à l’âge de 79 ans. Il sera enterré cet après-midi au cimetière de Tapolca. Il se devait d’y être. Cela ne pouvait se passer autrement. Son ancien chef d’escadrille, sans famille, était resté en Hongrie nouvellement conquise par les Russes. Il sut garder une vie très discrète, tout du moins assez pour ne pas lui attirer d’ennuis. Il était connu jusqu’à ce jour à Tapolca pour un chef d’orchestre hors pair…
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Quelques clichés de la région du Lac Balaton aujourd’hui, tel qu’a pu le redécouvrir Nikolas Ghiniolescu.
La ville de TAPOLCA. Au fond à droite, le plateau rocheux qui abritait la base du même nom. Au fond, on distingue le Lac Balaton.
La Base BBk aujourd'hui (authentique !!!). La ville de Sofiok profite toujours de ces 3 petites criques naturelles situées au Sud de la ville pour y abripter des bateaux, ... de plaisance cette fois !
La ville de Zalakaros, au bord du Petit Balaton où était situé les canons de 152 mm.
La Base de Bàbolna a été transformé un centre de dressage hippique, reconnue dans toute la Hongrie... (authentique).
Une photo de l'extrémité Nord-Est du Lac Balaton prise depuis la péninsule de Tihany (qui coupe presque le lac en deux). Lors du raid nocturne sur la Base BBk, la ville était en feu.
Baissé de rideau sur le Lac Balaton, aujourd'hui, un soir de fin d'été, comme en septembre 1944...