Budennovsk, 120 km au Nord de la frontière

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Tigre-bleu
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#1

Message par Tigre-bleu »

Allez, comme c'est le calme plat, je vous livre ce que j'avais écrit alors que j'avais rien à faire un après midi du mois d'aout (c'est mon coup d'essai). ^_^ Attention; non-writer inside.

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Budennovsk, 120 km au Nord de la frontière Tchétchène, 4 février 1995, 09 :00

Une activité matinale fébrile mais habituelle anime l’aérodrome de Budennovsk. Les VVS basés ici volent sans relâche pour porter soutien à nos troupes au sol à Grozny. Cela va faire 3 mois, depuis le 11 décembre pour être précis, que les forces terrestres ont commencé leur avancée. Depuis pour nous, la vie s’est transformée en une ribambelle de frappes sur la ville, de missions d’appui feu, de destruction de dépôts de munitions, d’attaque de QG Tchétchènes et ce qui nous a le plus occupé le plus ces derniers temps : des destructions de ponts sur l’Argun, suivies de vols de reconnaissance pour confirmer les frappes. Ce fleuve longe la ville à 10 km à l’Est et notre boulot est d’empêcher tout ravitaillement des troupes assiégées dans la ville.

Le boulot n’est pas de tout repos, les rebelles redéploient sans cesse leurs défenses aériennes dans le territoire qu’ils contrôlent, et pour nous pas moyen de savoir où elles se terrent, prêtes à entrer en action. Les canons ZSU-23-4, les Igla, les Strela-2 et 3 sont un vrai cauchemard pour les hélicos, et, dans une moindre mesure, pour nous. Enfin c’est comme ça, c’est la guerre. Encore on a de la chance nos SU-25 n’ont pas a s’inquiéter d’une quelquonque opposition aérienne. La force aérienne Tchétchène qui ne se composait que d’appareils d’entraînement a été réduite à néant dès le début des opérations en Tchéchénie, et de toute façon nous avons en permanence une poignée de SU-27 qui interdisent le territoire.

Pour changer, le temps est très couvert, une couche de Stratus et d’Altostratus aux alentours de 4000 m. Pour nous ça ne change pas grand chose mais les SU-24 d’à coté de vont pas être à la fête. Un rayon de soleil perce la couche et vient illuminer les hangars de maintenance à l’autre bout de la piste, je m’arrête quelques secondes regarder ce spectacle. Côtoyer le danger à longueur de journée a cet effet qu’il vous fait savourer tous les petits plaisirs de la vie que l’on ne remarquerait même pas en temps normal. De mon coté je n’ai pas trop à me plaindre, le pire que j’ai eu c’est quelques impacts d’armes légères dans le fuselage qui ont percé de réservoir droit, mais j’ai pu revenir sans soucis. Puisse cela continuer ainsi.

Déjà le rayon disparaît et j’aperçois le Commandant Nikolaï Bairov qui vient vers moi. C’est mon meilleur ami ici. On s’est connu quand je faisais ma formation sur Albatros et il m’a sauvé la vie. Je ne l’oublierai jamais. Quelle tête brûlée je faisais alors, quand j’y repense. C’est lui qui faisait mon instruction sur L-39 et à la première sortie je n’ai pas résisté à l’envie de me retourner les pinceaux avec ce bel oiseau. Mais je n’avais pas encore l’expérience des jets et la première ressource m’envoya dans les pommes illico-presto. Tout seul je me tuais mais Bairov, qui avait beaucoup plus d’expérience que moi ne s’évanouit pas et rattrapa le virage engagé. J’en fus quitte pour une engueulade premier choix ainsi qu’une sérieuse mise à pied, mais j’en garde une reconnaissance éternelle.

« - Salut Piotr.
Salut Nikolaï, Sale temps hein ?
Ouais, je me demande où on va nous expédier aujourd’hui…
Ta curiosité va être satisfaite, j’ai l’impression qu’on vient. »
En effet, une UAZ se dirige vers nous et s’arrête à quelques pas
« - Commandant Bairov, Lieutenant Markov, le colonel Youbkine vous demande en salle de briefing
Bien Sergent, nous arrivons »

Nous nous dirigeons vers la salle de briefing silencieusement. Chacun redoute pour la mission qui vient. Je brise le silence
« - A ton avis on part où ?
Je te parie deux paquets de cigarette que c’est encore un pont a bombarder
Tenu, moi je pense que c’est encore un de ces maudits QG terré au fond d’un bunker »
Salut de rigueur au colonel, et celui-ci commence son briefing.
« - Votre objectif aujourd’hui : un pont sur l’Argun dont voici la position sur la carte.
J’esquisse un sourire : merde, j’ai perdu mon pari
Votre indicatif sera Lynx, le nôtre est Cobra. Votre plan de vol sera simple : Croisez Grozny par l’Est au dessus de la couche, ce qui vous rendra peu vulnérable puis percez au niveau de l’objectif. Vous allez leur jaillir sous le nez et détruire le pont en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. Puis grimpez et revenez direct. Vos deux Frogfoot seront équipés de bombes FAB-500 et de deux paniers à roquettes chacun. Comme d’habitude, prenez gardes aux défenses aériennes mobiles qui ont autant de chance de protéger ce pont que d’en protéger un autre. Attention aussi aux missiles portables, ces satanées machines ont déjà abattu plusieurs hélicoptères. Vous décollerez dans 30 minutes, allez vous préparer. Des questions ?

Aucune ? Alors c’est parfait alors a vos combinaisons et bonne chance. »

Bon et bien allons-y, allons faire notre boulot.

Budennovsk, 4 février 1995, 09 :25

Nos deux bébés nous attendent sur le tarmac, les moteurs tournent déjà. Un dernier regard puis Nikolaï et moi nous grimpons dans nos cockpit, aidés par nos mécanos. Cet environnement familier calme un peu la tension qui m’étreint depuis que j’ai enfilé ma combinaison de vol. On me sangle, on retire l’échelle. Tout est OK. Merci Youri, tu peux aller te reposer, c’est moi qui vais faire mumuse avec ton joujou et je te le ramène tout à l’heure pour que tu continues à le bichonner.
« - Lynx 2 de Lynx 1 tu me reçois ?
C’est Nikolaï qui fait ses essais radio.
Je te reçois 5 sur 5 Lynx 1
Roger, je te reçois 5 aussi. Bon on y va, je contacte la tour
Cobra de Lynx Leader au parking, nous attendons les instructions
Roulez pour le point d’arrêt piste 28 Lynx.
Lynx, on Roule pour la 28. Out »
Freins enlevés, nos deux SU-25 alourdis de bombes s’ébrouent et lentement rejoignent le point d’arrêt 28. Ralenti, Paramètres moteurs gauche et droits, tous les essais y passent et Nikolaï contacte la tour
« - Cobra de Lynx, nous sommes prêts pour l’alignement
Lynx, Autorisé alignement et décollage piste 28. Vent du 240, 10 nœuds, rappelez en sortie de zone
Lynx, on s’aligne et on décolle. On rappelle en sortie de zone. Out »
Pesamment les deux pesantes machines s’alignent en échelon refusé et la procédure de décollage commence.
« - 90% de poussé : TOP
Puissance maxi : TOP
Freins : TOP
Dans le hurlement de leurs réacteurs, les deux SU-25 se ruent à l’assaut de la piste. Ici, pas de post-combustion alors il faut courir le long de la piste avant d’avoir la vitesse nécessaire.
Rotation : TOP

Budennovsk, 4 février 1995, 09 :31

Les roues de nos deux monstres d’acier s’arrachent à la pesanteur.
2, Airborn
Ok Piotr on prends direct le cap 170, je quitte avec la tour
Roger
Cobra de Lynx, en direction de son objectif pour quitter la fréquence.
Lynx, vous êtes autorisés à quitter la fréquence, bonne chance OUT »

Nous voilà seuls fonçant plein Sud pour détruire un pont que nous ne connaissions pas, que nous n’emprunterons jamais, mais qu’il nous faut détruire. C’est idiot, me dis-je, après la guerre ça va coûter un argent fou de reconstruire tous ses ponts. Je souris à l’idée que j’aurais mieux fait de m’engager dans les travaux publics.
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*La théorie, c'est quand on sait tout et que rien ne fonctionne.
*La pratique, c'est quand tout fonctionne et que personne ne sait pourquoi.
*Ici, nous avons réuni théorie et pratique : Rien ne fonctionne... et personne ne sait pourquoi !
- Albert Einstein -

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